Le Concours Médical
Lundi, Novembre 25, 2019

PATIENT-SOIGNANT. Comment dessiner ce binôme ?

Longtemps cantonné au rôle d’objet du soin, le patient est, depuis la mise en oeuvre des dernières mesures gouvernementales, partie prenante de la gouvernance et de l’organisation des équipes. Une ressource précieuse pour répondre aux attentes du territoire et mieux définir l’offre de soins.

Quelle place pour le patient au sein de l’équipe ?

Plusieurs lois successives ont validé les droits et le rôle du patient dans notre système de santé.
Aujourd’hui, bon nombre d’équipes comptent un patient au sein de leur organisation.
Patient expert, ressource, partenaire, pair, formateur… Les rôles sont multiples, mais des freins persistent.

Si la loi du 4 mars 2002 (loi Kouchner) reconnaît les droits du patient*, devenu acteur de sa prise en charge, celles du 21 juillet 2009 (loi HPST) et du 26 janvier 2016 (loi de modernisation de notre système de santé) posent toutes deux des orientations pour une nouvelle organisation avec un fort accent sur le rôle du patient. Ce que prévoit « Ma Santé 2022 » ? « Mettre le patient au centre » en l’impliquant dans la formation initiale des soignants, en mesurant sa satisfaction et son vécu des soins, et en passant « d’une approche en silo à une approche centrée sur [ses] besoins ». Objectif : passer d’un patient- objet à un patient-sujet. Car la maladie chronique peut aussi être « source de développement, occasion d’apprentissages et d’acquisition de savoirs issus du vécu, savoirs qui peuvent être utiles à la société et au système de santé »(1).

 

DU SINGULIER AU PLURIEL

Longtemps réduit au rôle d’objet du soin – le mot « patient » vient d’ailleurs du latin patiens « souffrir, endurer » –, le patient est aujourd’hui expert, partenaire, aidant, ressource, accompagnateur, formateur... Un changement de posture et une multitude d’appellations (voir p. 22) qui témoignent de la diversité des champs d’action potentiels : « Le vécu du patient apporte un point de vue complémentaire à celui des professionnels de santé. En tenir compte est une nécessité pour que notre système de santé évolue vers plus de démocratie », précisait Agnès Buzyn en 2016, alors présidente de la Haute Autorité de santé (HAS). Ce nouveau profil vient ainsi bouleverser la « relation bilatérale entre le patient et le médecin » : « le colloque [singulier] devient pluriel »(2).

La participation du patient(3) est une obligation légale, rappelle Catherine Étienne, membre fondateur de l’Association nationale pour le développement de l’approche du pouvoir d’agir. En France, poursuit-elle, on en reconnaît quatre registres : informer, consulter, se concerter et coproduire. Une coconstruction qui, pour Delphine Blanchard, patiente partenaire depuis 2018, est « indispensable » : « Elle permet de résoudre le problème de perte de sens dont parlent souvent les professionnels. Élaborer un projet avec le patient aide à reprendre contact avec l’essence même de son métier. »

Atteinte d’une insuffisance rénale, Delphine Blanchard s’est formée à l’éducation thérapeutique du patient (ETP) en 2014 pour « arriver à me situer dans l’univers du soin dans [...]

 

* Tendance sociétale dont l’élément fondateur en France a été la tenue des États généraux des malades du cancer, en 1998, à l’initiative de La Ligue nationale contre le cancer.
1. Daix C, Lartiguet P et Ragain-Gire F. Accompagner la reconnaissance des savoirs expérientiels pour faire évoluer le système de santé. Santé Éducation, Afdet, sept-déc. 2017.
2. Boudier F, Bensebaa F, Jablanczy A. L’émergence du patient-expert : une perturbation innovante. Innovations, 2012/3, no 39.

 

 

Auteurs: 
Karen Ramsay et Gaëlle Desgrées du Loû