Février 2016

Ostéoporose postménopausique. Fracture de fragilité : coordination ville-hôpital à renforcer

Pr Thierry Thomas


Pourquoi un dossier sur l’ostéoporose postménopausique en 2016 ? Les raisons en sont multiples. On pourrait mettre en avant l’évolution régulière des recommandations de prise en charge de cette maladie, l’arrivée de traitements nouveaux apportant des perspectives de stratégie thérapeutique différentes, la réévaluation du rapport bénéfices-risques du traitement hormonal de la ménopause, le développement des moyens de suivi. Pourtant, la raison principale est certainement autre : le paradoxe observé entre un nombre absolu de fractures de fragilité compliquant cette maladie toujours croissant année après année, d’une part, et une diminution dramatique du nombre de malades traitées, d’autre part.

 

Selon les données de la CNAMTS, seules 15 % des personnes (principalement des femmes) ayant eu une fracture, c’est-à-dire celles à risque de nouvelle fracture les plus évidentes à identifier, reçoivent un traitement spécifique de l’ostéoporose visant à réduire significativement ce risque. C’est une véritable faillite collective à toutes les étapes de la prise en charge médicale, avec un coût sociétal et individuel très élevé. Il faut le rappeler, la survenue d’une fracture de fragilité sévère comme la fracture de l’extrémité supérieure du fémur ou de l’humérus, comme les cascades fracturaires vertébrales, constitue très souvent chez une personne fragile un tournant dans sa vie induit par les douleurs, le handicap et la perte d’autonomie.

Revenir aux fondamentaux pour revisiter les étapes de la prise en charge

Face à ce constat, il faut revenir aux fondamentaux et revisiter les différentes étapes d’une prise en charge adaptée face à cette maladie chronique et fréquente, des qualificatifs qui contribuent certainement à la banaliser. Il faut aussi envisager des approches nouvelles venant bousculer un ordre mal établi. C’est ce que nous avons voulu faire dans ce dossier en nous concentrant sur la population largement la plus touchée, la population féminine après la ménopause : ce que nous pouvons faire en prévention primaire, avant que l’état osseux ne se dégrade. Quelle place donner maintenant au traitement hormonal ? Quel rôle nouveau confier à la médecine du travail dans cette étape clé ?

 

Les auteurs des articles suivants guideront ensuite le lecteur dans les différentes étapes du parcours de soins et principalement face aux deux situations médicales habituelles, la patiente ayant eu une fracture de fragilité, avec la nécessité de repérer les ostéoporoses secondaires et les maladies osseuses pouvant simuler une ostéoporose, et l’identification des femmes à risque de fracture, fondement de la stratégie de prise en charge avec des médicaments à visée anti-ostéoporotique.

La fracture de fragilité : activateur pour renforcer la coordination ville-hôpital

À qui prescrire une ostéodensitométrie ? Comment prendre en compte les facteurs de risque de fragilité osseuse, la localisation de la fracture ? Tenir compte de la fragilité des patientes, du risque de chutes croissant avec l’âge ou favorisé par des comorbidités comme la maladie de Parkinson. Tous ces éléments sont de mieux en mieux codifiés et sont détaillés ici.

 

Une fois le risque identifié et l’indication thérapeutique retenue seront abordés le choix thérapeutique prenant en compte la balance bénéfices-risques à évaluer de manière individuelle avec la patiente, les moyens de suivi à mettre en oeuvre. Insistons dès ce préambule sur le fait que la supplémentation en calcium et vitamine D, nécessaire chez les personnes carencées, ne constitue pas en soi un traitement de l’ostéoporose. Au-delà du traitement pharmacologique, des programmes d’éducation thérapeutique existent pour aider la malade à vivre avec sa maladie ostéoporotique. Leurs messages clés peuvent être utilement repris dans l’entretien médecin-malade en médecine générale. Dans cette démarche, les associations de malades peuvent également être une aide pour la patiente et son médecin. Nous leur avons réservé une place.

 

Au-delà de ce dossier, c’est une meilleure coordination ville-hôpital que nous devons construire, dans un parcours de soins adapté à la patiente ostéoporotique, et spécifique à chacune des étapes de sa vie avec cette maladie.