Polykystose rénale autosomique dominante. Repenser le parcours de soins aussi au-delà du rein
Qui connaît la polykystose rénale autosomique dominante (PKRAD) ? C’est une maladie méconnue non seulement du grand public mais également de nombreux médecins et des pouvoirs publics, bien moins médiatisée que d’autres maladies génétiques. Pourtant, la PKRAD est une pathologie relativement fréquente, l’une des maladies génétiques les plus répandues au monde, de loin la plus fréquente des maladies génétiques rénales. Elle toucherait environ une personne sur mille, soit plus de 60 000 personnes en France et plus de 12 millions dans le monde. De plus, la PKRAD est une maladie dont l’impact économique et social est fort.
Prévoir le rythme de progression : un des enjeux actuels
La PKRAD est une maladie évolutive, car, comme bien d’autres maladies rénales, dans la grande majorité des cas elle progresse au fil des années vers l’insuffisance rénale terminale. Le rythme de progression varie cependant grandement d’une famille à l’autre et même au sein d’une même famille, d’un individu à l’autre. L’un des enjeux actuels est de comprendre pourquoi le rythme de progression rénale est si différent, et d’identifier les patients les plus à risque de progresser rapidement pour les faire bénéficier des nouvelles thérapeutiques et leur proposer de participer aux essais cliniques en cours et à venir. Le type de mutation des gènes PKD1 ou PKD2 joue un rôle certain, mais d’autres facteurs, notamment des gènes « modificateurs », interviennent aussi.
Pas seulement des kystes rénaux évolutifs
La PKRAD est une maladie « systémique » car, à côté de l’atteinte rénale, des kystes hépatiques, plus ou moins nombreux et volumineux, ou des anévrismes des artères cérébrales et d’autres anomalies vasculaires bien plus rares peuvent être la source de complications parfois graves. Les anévrismes cérébraux sont plus fréquents chez les patients atteints de PKRAD que dans la population générale. Les accidents de rupture sont certes exceptionnels, mais graves. Les anomalies cardiaques associées à la PKRAD sont l’hypertrophie ventriculaire gauche et certaines malformations des valves. Des kystes peuvent aussi être identifiés dans le pancréas. Enfin, certaines anomalies de la paroi du côlon (diverticules) ou de l’abdomen (hernies) sont associées à la PKRAD.
Parcours de vie, aussi et beaucoup au sens familial
Comme toute maladie chronique, la PKRAD relève non seulement d’un parcours de soins mais aussi d’un parcours de vie avec ses aspects sociaux, psychologiques, économiques. Les témoignages et les actions des personnes malades et de leur famille, isolées ou regroupées au sein d’associations, nous apprennent beaucoup à cet égard. Certes, l’organisation et l’articulation du suivi sur le long terme selon les phases de la maladie sont essentielles, mais la PKRAD interpelle aussi par sa propension à bouleverser les familles. Ce bouleversement est notamment inhérent à son mode de transmission « dominant » et au risque élevé (50 %) de la transmettre à sa descendance, engendrant parfois un refus de procréer ou une culpabilité « de transmettre ». De fait, à l’occasion de don de rein, un problème majeur se pose fréquemment : plusieurs « receveurs potentiels » sont concernés (dans la fratrie) et le « donneur potentiel » est pris dans le dilemme angoissant de devoir parfois « choisir » à qui donner un rein…
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