Septembre 2016

MICI à l’âge adulte. Vers une rémission clinique et endoscopique pour un retour à une vie normale

Pr Laurent Peyrin-Biroulet


Les maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI) sont fréquentes, représentant un véritable problème de santé publique dans les pays riches. Leur étiologie reste inconnue même si des mécanismes complexes impliquant la flore intestinale et une susceptibilité génétique contribuent à la pathogénie. En 2016, les MICI restent incurables et seuls des traitements suspensifs sont disponibles. L’impact sur la vie socio-professionnelle des patients est majeur, souvent sous-estimé : ces maladies chroniques restent très invalidantes, d’autant qu’elles touchent souvent des sujets jeunes qui poursuivent leurs études ou qui sont à la recherche d’un premier emploi.

 

Tout patient présentant des douleurs abdominales et/ou une diarrhée chronique doit être suspecté d’avoir une MICI même si, au final, seulement un faible pourcentage d’entre eux sera concerné, des troubles fonctionnels intestinaux étant diagnostiqués dans l’immense majorité des cas. Certains signes comme des manifestations extra-intestinales, une atteinte ano-périnéale, une protéine C-réactive élevée, une anémie ou une carence martiale doivent faire évoquer une MICI. Les médecins traitants jouent donc un rôle clé pour un diagnostic précoce mais également pour le suivi de ces patients. Les biothérapies (infliximab, adalimumab, golimumab, védolizumab) sont de plus en plus utilisées au cours des MICI puisque 40 % des patients avec une maladie de Crohn sont exposés aux anti-TNF et environ 20 % au cours de la rectocolite hémorragique.

L’objectif d’une rémission clinique et muqueuse

Les symptômes n’étant pas bien corrélés aux lésions intestinales, en particulier au cours de la maladie de Crohn, il est devenu indispensable de réaliser des examens paracliniques répétés et rapprochés évaluant l’activité intestinale (échographie, IRM, protéine C réactive, calprotectine fécale et/ou endoscopie). Le scanner ne doit plus être utilisé dans le suivi de ces patients en raison de son caractère irradiant. Notre objectif thérapeutique actuel est l’obtention d’une rémission clinique et muqueuse, ceci afin d’espérer modifier l’histoire naturelle de ces maladies (hospitalisations, chirurgie, handicap fonctionnel, destruction de la paroi intestinale).

 
Suivi rapproché et éducation thérapeutique

La télémédecine (dont tout le monde parle mais dont personne ne sait quelle doit être sa place en pratique clinique) pourrait aider au suivi rapproché, non invasif de ces patients et à un contrôle serré de la maladie. Le risque infectieux est souvent au premier plan sous immunosuppresseurs et biothérapies : en cas de fièvre, il faut toujours contacter le gastroentérologue référent afin de discuter de la conduite à tenir et d’éliminer une infection opportuniste. L’observance est un problème majeur chez ces patients souffrant d’une maladie chronique, et l’éducation thérapeutique doit être au centre de la prise en charge. Mais son financement, la nécessité d’une formation de plus en plus poussée et le besoin d’avoir du personnel dédié sont des freins qu’il faudra savoir lever sous peine de voir l’éducation thérapeutique réservée à des centres experts.  

 
Rôle clé des associations de patients

Le rôle de ces associations est essentiel pour fournir des informations correctes aux malades au moment où il faut faire le tri parmi un flot incessant, notamment sur Internet. Les problèmes d’assurance, de vie professionnelle et le soutien de la recherche scientifique sont d’autres actions menées par l’Association François Aupetit (afa). Point important, l’afa est la seule association en France dédiée aux patients atteints de MICI, contrairement à la rhumatologie, par exemple ; ceci facilite la visibilité du travail associatif dans le domaine des MICI.

 

Seules une mobilisation sans précédent des pouvoirs publics et une prise en charge multidisciplinaire (médecin traitant, infirmière, chirurgien, pharmacien, gastroentérologue, nutritionniste, psychologue, association de patients) permettront d’en changer l’histoire naturelle et d’améliorer le quotidien des patients avec une MICI