Novembre 2019

EXPÉRIMENTATION. Équilibres, une toute nouvelle approche des soins

Une nouvelle expérimentation concernant les infirmières de ville se met en place dans trois régions : Hauts-de-France, Île-de-France et Occitanie.
Portée par l’association Soignons humain, elle regroupe des équipes d’infirmières libres, responsables et solidaires (Équilibres) qui introduisent une nouvelle philosophie dans la prise en charge des patients et modifie la rémunération de ces soignants.

 

Inspirée du modèle hollandais Buurtzog qui signifie « soins de proximité », l’expérimentation Équilibres – dont le décret est paru le 18 juillet au Journal officiel(1) – vise à encourager la prise en charge globale des patients en ville par les infirmières libérales ou de centres de santé. Une expérimentation proposée par l’association Soignons humain dans le cadre de l’article 51 de la loi de financement de la Sécurité sociale de 2018 sur les organisations innovantes « afin d’améliorer la qualité des soins perçus par les patients tout en prenant en compte les besoins des professionnels de santé et ceux du système de santé, explique Guillaume Alsac, président de l’association. Il est toujours possible de trouver des solutions durables en considérant toutes les parties concernées ». Pérennisation du système de santé, amélioration et valorisation des conditions d’exercice des infirmières font donc partie des objectifs affichés. « Avec ce modèle, nous cherchons à déployer un contexte favorable qui permettra aux infirmières de mieux accomplir leurs missions », ajoute-t-il.

Étalée sur trois ans, l’expérimentation Équilibres se déploie dans trois régions (Hauts-de-France, Île-de-France et Occitanie) et compte un accompagnement afin d’adhérer à la philosophie du dispositif.

Les infirmières impliquées s’engagent ainsi à travailler en équipe de trois ou quatre tout en mutualisant leur patientèle. « Elles doivent également partager notre vision holistique des prises en charge », souligne Guillaume Alsac. Pour tendre vers ce type de fonctionnement, elles seront accompagnées par un coach. « Tous les syndicats dénoncent l’isolement des infirmières de ville, qui conduit parfois au burn out, rappelle-t-il. Le travail d’équipe constitue un rempart. Nous essayons donc d’avoir une incitation concrète dans ce sens. »

Dans le cadre d’Équilibres, les infirmières doivent par ailleurs évaluer régulièrement les besoins de leurs patients avec un référentiel de santé standardisé – Omaha – et décider des objectifs à fixer pour tendre vers leur autonomisation. Elles vont donc bénéficier d’une formation à l’utilisation du logiciel en amont de l’expérimentation. « Elle est nécessaire afin que l’infirmière sache correctement s’en servir pour créer tous les dossiers patients et définir, pour chacun, une estimation du temps de prise en charge quotidien », fait savoir Mathieu Nochelski, infirmier, cofondateur et membre du CA de Soignons humain. Une anticipation utile pour la facturation.

 

UN NOUVEAU MODE DE RÉMUNÉRATION

L’expérimentation repose enfin sur un honoraire simplifié pour les infirmières de ville, avec la création d’un forfait au temps passé auprès des patients, qui se substitue à la tarification à l’acte – les infirmières ont plus de 90 cotations possibles. Le forfait horaire est de 0,9 euro par minute, peu importe l’acte réalisé. « Que ce soit des actes techniques ou des soins de nursing, les infirmières appliquent le forfait », indique Chrystèle Leman, infirmière, cofondatrice et membre du conseil d’administration de l’association. « Avec l’expérimentation, la Caisse nationale de l’Assurance maladie accorde une dérogation à la rémunération des infirmières de ville, poursuit Guillaume Alsac. Elle a développé une interface pour que les professionnels, qui ne vont plus coter à l’acte, puissent envoyer leurs facturations pour percevoir leurs honoraires. »

La première vague de cabinets infirmiers sera accompagnée dans chacune des trois régions. « Nous allons prendre le temps de bien les former et de les encadrer avec des facilitateurs et des coachs, souligne Chrystèle Leman. Puis nous lancerons une deuxième vague. L’objectif est d’atteindre une soixantaine de professionnels inclus dans le dispositif à l’échéance 2020. »

1. Voir Legifrance.gouv.fr