Juin 2018

LA TÉLÉMÉDECINE. Bientôt consacrée, malgré les réticences ?

 

Dans le cadre des Ehpad, le recours à la télémédecine fait déjà l’unanimité. Remboursée dans certains cas depuis novembre 2017 (téléexpertise dossier traitant [TDT] en cas de changement de médecin traitant pour un patient nouvellement admis en Ehpad, ou téléconsultation médecin traitant avec Ehpad [TTE]), sa généralisation doit éviter des hospitalisations et déplacements inutiles aux résidents. Pour Colette, 81 ans, résidente en Ehpad dans le Nord-Pas-de-Calais, c’est « un soulagement. Ces trajets sont souvent éprouvants et déstabilisants à notre âge ». Testées dans certains hôpitaux, les téléconsultations rencontrent aussi un résultat positif. En plus de réduire les déplacements, « cela implique les patients dans leur prise en charge », explique le Dr Patrick Jourdain, cardiologue au centre hospitalier de Pontoise. Un soulagement aussi pour les habitants de zones isolées, comme les îles, les régions montagneuses…

 

MAIS BEAUCOUP DE CONTROVERSES

 

Alors que les pouvoirs publics affirment pouvoir lutter contre les déserts médicaux en développant la télémédecine, cet argument est décrié par beaucoup de médecins, à l’instar du Dr Jean-Paul Hamon : « Si on pense que dans ces déserts les médecins pourront être remplacés par un fauteuil de télémédecine… Je plains les patients ! ». Alors que 5,3 millions de Français résident dans une zone sous-dense selon le dernier rapport de la DREES, « il est peu probable qu’elle résolve le problème de l’accessibilité aux soins », constate Myriam Le Goff, économiste. Le problème provient de la rhétorique gouvernementale « qui présente trop la télémédecine comme une solution radicale aux déserts médicaux. La télémédecine n’est qu’un outil parmi d’autres », rappelle le Dr Pierre Simon, néphrologue et ancien président de la Société française de télémédecine. Autre point de controverse, la délégation de certains actes aux infirmières, qui se trouveraient à distance auprès d’un patient : « Il faut que l’on comprenne que le médecin n’est pas seul en charge de toutes les maladies », estime Pierre Simon. Une idée encore difficile à entendre pour certains médecins généralistes qui estiment notamment que les futures IPA (infirmièr(e)s aux pratiques avancées) ne disposeront pas des compétences requises pour ce suivi (voir pp. 10-11). Du côté des médecins, il n’existe pas de véritable politique universitaire en matière de télémédecine. [...]